Pensées vagabondes… 93. Le Grand Fleuve

Honnêtement, voter Août en Ju-in, il faut avoir l’esprit angulé…

Ce royaume est-il encore correct ? (« Is the UK OK? »)

Est-ce le pire land?

Ou croient-ils qu’on a la gale ?

Est-ce la fin des haricots ? mais non, on peut encore les écosser…

Le roi observait le Grand Fleuve.

Sur ses berges accueillantes paressaient quelques barques de retour des pêches de la nuit. Une mule était attelée à un chadouf et ses mille pas emplissaient d’eau le canal qui courait vers l’intérieur des terres où il se divisait et se divisait encore en multiples rigoles qui irriguaient ce qui était hier encore un désert.

Les plantes du désert, comestibles ou non, se nourrissaient de ce soleil qui, sans eau, les aurait grillées et dévorées. Elles buvaient l’eau de ce fleuve dont elles resteront toujours éloignées, comme elles seront toujours loin de cette mule qui irriguait leurs racines. Et la mule se nourrissait des plantes de ce désert dans lequel elle ne mettra jamais les sabots.

Le roi regardait la mule. La mule ne regardait pas le roi. Elle ne voyait que l’homme qui la tirait par la bride et qui, parfois, l’invectivait. Le roi regardait cette mule, qui ne savait pas l’importance de faire tourner la roue à laquelle elle était enchaînée.

Et le roi vit que les soldats qui usaient leurs semelles aux frontières ne connaissaient pas le savetier qui avait découpé avec soin chaque lanière dans les cuirs les plus souples et qui avait assemblé ces lanières aux semelles taillées dans les cuirs les plus durs. Et le savetier ne verra jamais les frontières.

Ainsi en est-il du royaume, où les muletiers invectivent les mules, où l’eau circule du fleuve au désert pour transformer ce désert en jardin, où les hommes les plus tendres servent comme forgerons ou artisans, où les hommes les plus durs servent aux frontières ou encadrent dans les écoles la jeunesse tumultueuse, gardiens de cette autre frontière entre le présent et l’avenir.

Mais qu’un seul sujet du royaume vienne à défaillir, la mule ou le muletier, le soldat ou le savetier, l’eau ou les plantes, le fleuve ou le désert, le regard du roi ou les invectives du muletier, et tous se tourneront vers le roi avec ferveur, l’implorant de rassembler encore ce qui leur fait défaut et de reconstruire, ici ou ailleurs, un autre jardin.

 

Philippe

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